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Titre
Albert à son frère Emmanuel (27 mai 1873)
Date
27/05/1873
Lettres Item Type Metadata
Location
Peking
Expediteur
Albert
Destinataire
Emmanuel
Transcription
Pékin, le 27 mai 1873
Mon cher Emmanuel
Avant de continuer avec toi l’histoire naturelle de Pékin et ses environs, je t‘annonce la réception, à la date du 19 mai, de ta longue et bonne lettre portant 20 mars comme timbre de Paris. Elle contenait un bon petit mot du Père Blair auquel je répondrai avant peu. Quand au Père Legouis, auquel tu as eu la bonne idée de t’adresser pour renseignements sur mes goûts et aptitudes, je lui ai envoyé une longue lettre il y a deux jours.
Mais passons aux animaux et aux plantes et, cela achevé je te parlerai de toi et de moi
Chameaux
Je t’ai laissé, si je me trompe, en étonnement devant un gros mongol dormant sur le dos de son chameau. Les affreuses bêtes, le plus laid animal que je connaisse, continuent de perdre leur fourrure par grandes plaques, et comme il fait très chaud, les chameliers se sont résignés à leur enlever leurs défroques de tapis de feutre. Dans quelques jours, les pauvres bêtes seront entièrement nues.
Alors elles ... (?) d’une espèce d’huile ou graine d’une odeur insupportable et le nouveau poil , celui d’été, repoussera en fin duvet soyeux qui en s’allongeant et grossissant deviendra la toison d’hiver.
Depuis que je suis à Pékin, n‘ayant vu qu’un seule fois des chameaux paître, je ne sais au juste de quoi on les nourrit ; quand à boire, il ne m’est encore jamais arrivé de les voir entrain de remplir leur citerne intérieure.
Milans
Le milan abonde ici, même dans la ville où on le voit constamment décrivant ses cercles au dessus des maisons. Puis, tout à coup, se laissant tomber comme une pierre. Il se relève en emportant dans ses serres un jeune poulet ou un morceau de viande.
Le Père David, lazariste (nota : Armand David, 1826–1900, Lazariste, zoologiste et botaniste, connu pour ses découvertes naturalistes en Chine au 19ème siècle) dit qu’on l’aurait d’abord pris pour le Milan japonais.
Un jour, m’a dit le Père Humblot (?), je passais dans la grande rue et regardais une pauvre femme à petits pieds qui s’en allait, boitillant sur ses moignons, tenant au dessous de son épaule sur sa main renversée un joli morceau de viande.
Tout à coup, elle sent un battement d’aile au dessus de sa tête et s’aperçoit, toute étourdie, que son morceau de viande a disparu. Tous les spectateurs d’applaudir ce maître voleur qui venait d’enlever proprement la viande, ne laissant sur la main de la vieille qu’une feuille de chou sur laquelle était la viande.
Les corbeaux
... qui sont énormes et en nombre considérable fondent quelquefois sur les milans qui se sauvent en piaulant. Un jour, un joli morceau de viande tombe du ciel aux pieds du jardinier du Peh-tang (nota ; signifie Église du nord – nom de la cathédrale Saint Sauveur de Pékin, mission catholique gérée par les Lazaristes). Il lève la tête et aperçoit un milan qui fuyait en piaulant devant une bande de corbeaux qui venaient de lui faire lâcher sa proie. Malheureusement, un second larron (le jardinier) s’en saisit et, sans être dégoûté, en fit son repas.
Quelques jours après, maître milan, apercevant sur le sol du même jardin, un morceau succulent croit rattraper sa proie et, fondant sur la viande vient s’enfermer dans un piège tendu par le jardinier qui se procura ainsi un chasseur excellent. Car ici, nous possédons encore cet art du moyen âge : la fauconnerie.
Et à tout instant vous voyez dans la ville et les campagnes, des chinois portant sur le poing un vautour (?), un épervier ou un milan, la tête encapuchonnée dans un petit sac de cuir qui ne laisse passer que le bec suivant leur force et leur espèce ; On les lance sur les lièvres ou les oiseaux. Je n’ai malheureusement pas encore eu la chance de voir cette chasse intéressante.
Pies
Le Père David mentionne 3 espèces de pies à Peking. Pour moi, je n’en n’ai jamais vu qu’une ou deux tout au plus, mais elles pullulent comme les pigeons dans nos rue de Cherbourg et elles ne s'envolent qu’au moment où le cheval va leur mettre la patte sur le dos. Les deux espèces sont la pie d’Europe et la charmante pie bleue de Pallas (Cyanopica cyanus). Quand à la 3ème, elle n’est pas commune à Péking. Les corbeaux sont énormes et abondants dans la ville, où ils construisent leurs nids sur tous les arbres en compagnie de freux, pies, choucas et merles.
Moineaux
Il y a pas mal de moineaux à Peking, mais ce n’est pas la même espèce que e sont pas les mêmes que notre Pierrot ; ce sont des moineaux d’arbres et on ne les voit pas aussi souvent sur le terrain que les nôtres.
Le coucou a déjà fat son apparition, venant d’Europe et les hirondelles de cheminées sont arrivées le mois dernier pour nous rappeler l’Europe. Toutes les autres espèces d’hirondelles font un séjour par ici. La Huppe existe même dans la ville : il y en avait deux dans le jardin du Peh-tang, fidèles au poste depuis quelques années. Malheureusement les chinois qui sont très adroits à attraper les oiseaux en ont pincé une que le Père Favier a délivré, mais elle n’est pas revenue.
Quant aux pics, ils sont fréquents et le Père David, que je cite, en a découvert un nouveau.
La famille des pigeons est nombreuse. Les ramiers font leur nid dans la ville ainsi que les voyageurs ? Les tourterelles sont abondantes aux environs et nous avons deux martin pêcheurs .
Gallinacées
La famille est fort nombreuse et notre table a abondé tout l’hiver de faisans. Nous en avons un particulier au pays. Il est magnifique et, du bout de sa queue, pendent verticalement de petites plumes roses espacées. On dirait des gouttes de sang. J’ai eu le plaisir de faire partir des faisans des buissons du Palais d’Eté.
Le coq de bruyère, la poule d’eau, le plongeon (oiseau aquatique), deux espèces de bécassines, les perdrix, deux espèces de cailles, etc...
J’ai vu passer au dessus de notre maison des vols d’oies sauvages, faisant un tapage impossible, de jolis hérons. Et dimanche, sur le lac du Palais d’Eté, j’ai fait lever une grue blanche, des cigognes.
J’ai vu avec étonnement au musée de Peh-tang, un ibis rose (Ibis du Japon) tiré par le Père David pendant les froids à quelques lieues au nord de Péking. Sur les lacs du Yuen Ming Yuen (Nota : Yuanmingyuan – Ancien Palais d’Eté comportant un vase réseau de lacs et de canaux), on voit quelquefois le cormoran qui n’est pas rare à Takou (embouchure du Pei Ho). Les cygnes passent fréquemment par ici à l’état sauvage.
Je crois que je t’ai assez ennuyé sur les oiseaux de la capitale pour varier le sujet. Nous allons passer aux insectes.
papillons
Les papillons sont nombreux et fort beaux. Le Maihaon, le Vanesse, l’Argus, quelques uns sont originaires de Batavia (nota : Ancien nom de Jakarta). Ce sont des papillons noirs poudrés de vert doré.
Mouches
Les guêpes fourmillent etconstruisent leurs nids partout. J’en ai observé une qui le construisait sur le bois d’une fenêtre à Peh-Tang.
Il y a aussi des sortes de guêpes ichneumons, fort longues et jaunes. Enfin des mouches de toute espèce qui piquent et ... (?)
Les moustiques sont communs, mais on s’en préserve par des moustiquaires ; l’autre jour, à la campagne, j’ai fait connaissance avec leur piqûre. Je n’ai vu qu’une puce depuis que je suis ici. De punaise, encore aucune, mais j’ai une fois ramassé un pou sur ma manche : Un chinois que j’avais approché de trop près, m’en avait gratifié.
Scorpions
Ces agréables bêtes sont fort communes en été, particulièrement dans les endroits sales et humides. Leur morsure n’est pas mortelle, mais elle vous donne de la fièvre pour 4 ou 5 jours. Ils piquent par la queue mais n’en ayant pas encore vu ici, je ne peut en parler de visu. Je me propose de les étudier de près.
Mille pattes
Nous avons sur des graminées, des mille pattes. Ils sont fort curieux et inoffensifs. Je viens justement d’un pincer un assez joli et je le dessine pendant qu’il se tient tranquille au fond de mon verre. Il est d’une couleur gris avec deux points blancs à la base de chaque anneau. Les pattes pour commencer, environ 15 ou 16 pattes de chaque côté soit au total 30. Les pattes croissent de la tête à la queue et portent des marques passant sur la longueur des pattes sur la longueur des pattes du gris au noir. Les pattes arrières sont comme les antennes une fois et demi ou deux fois la longueur du corps. Dans la chambre, lieux secs.
Scolopendres
La scolopendre est longue mince d’un brun uniforme avec mille pattes courbes. Dan le Nord, elle est petite à Ningpo, elle atteint 1 décimètre (?) et plus et devient grosse comme le petit doigt. Partout elle est mauvaise et vous donne 5 jours de fièvre au moins. Quelques uns la craignent plus que le scorpion. Elle plaît dans les endroits humides.
Scarabées
J’ai entendu dire que nous en avons plusieurs espèces. J’en n’ai vu une seulement : c’est le scarabée noir qui ressemble beaucoup au scarabée égyptien si ce n’est le même et qu’il ne faut pas confondre avec notre bousier qui a de si jolis reflets métalliques.
Celui si est noir mat. Je l’ai vu porter dans ses serres un boyau de cheval 20 fois grosse comme lui. Aussi les chinois utilisent sa force pour lui faire tirer en guise de jouet, des petites charrettes en papiers et de moelle de sureau. Quelque uns de ces jouets sont si légers qu’une mouche seule suffit pour en trairer un de 10 ou 12 cm de long .
Animaux
Mais revenons à ce qui nous frappe plus ordinairement la vue.
Ânes
Les ânes sont fort petits et fort courageux. Ils ont un trot rapide et agréable et ils sont fort drôles à voir avec leur cavalier assis sur la croupe et un ânier qui court par derrière en tapant. Ils sont aussi forts, souvent attelés aux charrettes.
Chevaux
Ceux ci sont petits et forts, traînent charettes et sont montés en selle par soldats et particuliers. Ils trainent charettes.
Mules
Celles-ci sont fort nombreuses et souvent très grandes et fortes. Elles traînent les charrettes et voitures de poids. Chose curieuse : nées de deux individus petits, elles sont fort grandes, souvent comme nos chevaux. Je ne sais le prix d’un ânes, un cheval varie de 10 à 40 taël, mais les mules sont fort chères.
Elles vont souvent de 600/700 taël à 800/1000 et celles qu’on réserve pour la selle, montent plus haut encore. Elles travaillent 10 à 15 ans et on peut encore les revendre à moitié prix, soit 50 ou 100 Taëls.
Chiens
Il y en a plusieurs espèces. La plus commune est le chien de garde. Les ... (?) existent à peine en Chine, par contre, les brigands.
Chaque maison est gardée par son ou ses chiens ; les maisons riches ont en plus un veilleur qui, toutes les heures se promène et frappe sur un bambou creux pour avertir les voleurs que l’on veille.
Mais on a toujours au moins un chien et les riches en ont des bandes aussi rien de plus commun dans les rues de Pékin, on les voit devant chaque maison par bandes de 10 ou 12 hurler aux passants, se battre ou dormir au soleil. Ils haïssent particulièrement les européens et leur courent dessus en hurlant. Le seul moyen est de se retourner, de les menacer du poing ou des pieds ou de leur lancer une pierre. Alors ils décampent comme de vrais ... (?).
Leur poil est fort rude, dur et raide. Nous en avons un qui entre ... (?) quasi noir ... (?) d’une espèce de laisse. Ils ont la vie plus dure que plusieurs chats. J’ai vu casser cannes et bâtons sur leur dos sans les tuer.
Nota : L’entrée d’un chien dans une maison est de bonne augure : signe de richesse.
Chats
Pour ceux ci l'augure est celui de pauvreté c'est pour cela qu’ils sont rares comparativement aux chiens. Aussi les rats s’en donnent et on les entend courir par bandes sur nos plafonds en papier, passer effrontément sous nos yeux dans la salle à manger.
Serpents
Nombreux, peu dangereux. Dimanche dernier, j’en ai vu beaucoup nager dans les rizières. J’en ai remarqué un mort, qui était rouge et noir, fort joli.
Lézards
Deux ou 3 espèces fort communes.
Grenouilles
Quant aux grenouilles, elles foisonnent dans la rizière et font toute la nuit et la journée un bruit infernal par las croassements perpétuels et aigus
Mon cher Emmanuel
Avant de continuer avec toi l’histoire naturelle de Pékin et ses environs, je t‘annonce la réception, à la date du 19 mai, de ta longue et bonne lettre portant 20 mars comme timbre de Paris. Elle contenait un bon petit mot du Père Blair auquel je répondrai avant peu. Quand au Père Legouis, auquel tu as eu la bonne idée de t’adresser pour renseignements sur mes goûts et aptitudes, je lui ai envoyé une longue lettre il y a deux jours.
Mais passons aux animaux et aux plantes et, cela achevé je te parlerai de toi et de moi
Chameaux
Je t’ai laissé, si je me trompe, en étonnement devant un gros mongol dormant sur le dos de son chameau. Les affreuses bêtes, le plus laid animal que je connaisse, continuent de perdre leur fourrure par grandes plaques, et comme il fait très chaud, les chameliers se sont résignés à leur enlever leurs défroques de tapis de feutre. Dans quelques jours, les pauvres bêtes seront entièrement nues.
Alors elles ... (?) d’une espèce d’huile ou graine d’une odeur insupportable et le nouveau poil , celui d’été, repoussera en fin duvet soyeux qui en s’allongeant et grossissant deviendra la toison d’hiver.
Depuis que je suis à Pékin, n‘ayant vu qu’un seule fois des chameaux paître, je ne sais au juste de quoi on les nourrit ; quand à boire, il ne m’est encore jamais arrivé de les voir entrain de remplir leur citerne intérieure.
Milans
Le milan abonde ici, même dans la ville où on le voit constamment décrivant ses cercles au dessus des maisons. Puis, tout à coup, se laissant tomber comme une pierre. Il se relève en emportant dans ses serres un jeune poulet ou un morceau de viande.
Le Père David, lazariste (nota : Armand David, 1826–1900, Lazariste, zoologiste et botaniste, connu pour ses découvertes naturalistes en Chine au 19ème siècle) dit qu’on l’aurait d’abord pris pour le Milan japonais.
Un jour, m’a dit le Père Humblot (?), je passais dans la grande rue et regardais une pauvre femme à petits pieds qui s’en allait, boitillant sur ses moignons, tenant au dessous de son épaule sur sa main renversée un joli morceau de viande.
Tout à coup, elle sent un battement d’aile au dessus de sa tête et s’aperçoit, toute étourdie, que son morceau de viande a disparu. Tous les spectateurs d’applaudir ce maître voleur qui venait d’enlever proprement la viande, ne laissant sur la main de la vieille qu’une feuille de chou sur laquelle était la viande.
Les corbeaux
... qui sont énormes et en nombre considérable fondent quelquefois sur les milans qui se sauvent en piaulant. Un jour, un joli morceau de viande tombe du ciel aux pieds du jardinier du Peh-tang (nota ; signifie Église du nord – nom de la cathédrale Saint Sauveur de Pékin, mission catholique gérée par les Lazaristes). Il lève la tête et aperçoit un milan qui fuyait en piaulant devant une bande de corbeaux qui venaient de lui faire lâcher sa proie. Malheureusement, un second larron (le jardinier) s’en saisit et, sans être dégoûté, en fit son repas.
Quelques jours après, maître milan, apercevant sur le sol du même jardin, un morceau succulent croit rattraper sa proie et, fondant sur la viande vient s’enfermer dans un piège tendu par le jardinier qui se procura ainsi un chasseur excellent. Car ici, nous possédons encore cet art du moyen âge : la fauconnerie.
Et à tout instant vous voyez dans la ville et les campagnes, des chinois portant sur le poing un vautour (?), un épervier ou un milan, la tête encapuchonnée dans un petit sac de cuir qui ne laisse passer que le bec suivant leur force et leur espèce ; On les lance sur les lièvres ou les oiseaux. Je n’ai malheureusement pas encore eu la chance de voir cette chasse intéressante.
Pies
Le Père David mentionne 3 espèces de pies à Peking. Pour moi, je n’en n’ai jamais vu qu’une ou deux tout au plus, mais elles pullulent comme les pigeons dans nos rue de Cherbourg et elles ne s'envolent qu’au moment où le cheval va leur mettre la patte sur le dos. Les deux espèces sont la pie d’Europe et la charmante pie bleue de Pallas (Cyanopica cyanus). Quand à la 3ème, elle n’est pas commune à Péking. Les corbeaux sont énormes et abondants dans la ville, où ils construisent leurs nids sur tous les arbres en compagnie de freux, pies, choucas et merles.
Moineaux
Il y a pas mal de moineaux à Peking, mais ce n’est pas la même espèce que e sont pas les mêmes que notre Pierrot ; ce sont des moineaux d’arbres et on ne les voit pas aussi souvent sur le terrain que les nôtres.
Le coucou a déjà fat son apparition, venant d’Europe et les hirondelles de cheminées sont arrivées le mois dernier pour nous rappeler l’Europe. Toutes les autres espèces d’hirondelles font un séjour par ici. La Huppe existe même dans la ville : il y en avait deux dans le jardin du Peh-tang, fidèles au poste depuis quelques années. Malheureusement les chinois qui sont très adroits à attraper les oiseaux en ont pincé une que le Père Favier a délivré, mais elle n’est pas revenue.
Quant aux pics, ils sont fréquents et le Père David, que je cite, en a découvert un nouveau.
La famille des pigeons est nombreuse. Les ramiers font leur nid dans la ville ainsi que les voyageurs ? Les tourterelles sont abondantes aux environs et nous avons deux martin pêcheurs .
Gallinacées
La famille est fort nombreuse et notre table a abondé tout l’hiver de faisans. Nous en avons un particulier au pays. Il est magnifique et, du bout de sa queue, pendent verticalement de petites plumes roses espacées. On dirait des gouttes de sang. J’ai eu le plaisir de faire partir des faisans des buissons du Palais d’Eté.
Le coq de bruyère, la poule d’eau, le plongeon (oiseau aquatique), deux espèces de bécassines, les perdrix, deux espèces de cailles, etc...
J’ai vu passer au dessus de notre maison des vols d’oies sauvages, faisant un tapage impossible, de jolis hérons. Et dimanche, sur le lac du Palais d’Eté, j’ai fait lever une grue blanche, des cigognes.
J’ai vu avec étonnement au musée de Peh-tang, un ibis rose (Ibis du Japon) tiré par le Père David pendant les froids à quelques lieues au nord de Péking. Sur les lacs du Yuen Ming Yuen (Nota : Yuanmingyuan – Ancien Palais d’Eté comportant un vase réseau de lacs et de canaux), on voit quelquefois le cormoran qui n’est pas rare à Takou (embouchure du Pei Ho). Les cygnes passent fréquemment par ici à l’état sauvage.
Je crois que je t’ai assez ennuyé sur les oiseaux de la capitale pour varier le sujet. Nous allons passer aux insectes.
papillons
Les papillons sont nombreux et fort beaux. Le Maihaon, le Vanesse, l’Argus, quelques uns sont originaires de Batavia (nota : Ancien nom de Jakarta). Ce sont des papillons noirs poudrés de vert doré.
Mouches
Les guêpes fourmillent etconstruisent leurs nids partout. J’en ai observé une qui le construisait sur le bois d’une fenêtre à Peh-Tang.
Il y a aussi des sortes de guêpes ichneumons, fort longues et jaunes. Enfin des mouches de toute espèce qui piquent et ... (?)
Les moustiques sont communs, mais on s’en préserve par des moustiquaires ; l’autre jour, à la campagne, j’ai fait connaissance avec leur piqûre. Je n’ai vu qu’une puce depuis que je suis ici. De punaise, encore aucune, mais j’ai une fois ramassé un pou sur ma manche : Un chinois que j’avais approché de trop près, m’en avait gratifié.
Scorpions
Ces agréables bêtes sont fort communes en été, particulièrement dans les endroits sales et humides. Leur morsure n’est pas mortelle, mais elle vous donne de la fièvre pour 4 ou 5 jours. Ils piquent par la queue mais n’en ayant pas encore vu ici, je ne peut en parler de visu. Je me propose de les étudier de près.
Mille pattes
Nous avons sur des graminées, des mille pattes. Ils sont fort curieux et inoffensifs. Je viens justement d’un pincer un assez joli et je le dessine pendant qu’il se tient tranquille au fond de mon verre. Il est d’une couleur gris avec deux points blancs à la base de chaque anneau. Les pattes pour commencer, environ 15 ou 16 pattes de chaque côté soit au total 30. Les pattes croissent de la tête à la queue et portent des marques passant sur la longueur des pattes sur la longueur des pattes du gris au noir. Les pattes arrières sont comme les antennes une fois et demi ou deux fois la longueur du corps. Dans la chambre, lieux secs.
Scolopendres
La scolopendre est longue mince d’un brun uniforme avec mille pattes courbes. Dan le Nord, elle est petite à Ningpo, elle atteint 1 décimètre (?) et plus et devient grosse comme le petit doigt. Partout elle est mauvaise et vous donne 5 jours de fièvre au moins. Quelques uns la craignent plus que le scorpion. Elle plaît dans les endroits humides.
Scarabées
J’ai entendu dire que nous en avons plusieurs espèces. J’en n’ai vu une seulement : c’est le scarabée noir qui ressemble beaucoup au scarabée égyptien si ce n’est le même et qu’il ne faut pas confondre avec notre bousier qui a de si jolis reflets métalliques.
Celui si est noir mat. Je l’ai vu porter dans ses serres un boyau de cheval 20 fois grosse comme lui. Aussi les chinois utilisent sa force pour lui faire tirer en guise de jouet, des petites charrettes en papiers et de moelle de sureau. Quelque uns de ces jouets sont si légers qu’une mouche seule suffit pour en trairer un de 10 ou 12 cm de long .
Animaux
Mais revenons à ce qui nous frappe plus ordinairement la vue.
Ânes
Les ânes sont fort petits et fort courageux. Ils ont un trot rapide et agréable et ils sont fort drôles à voir avec leur cavalier assis sur la croupe et un ânier qui court par derrière en tapant. Ils sont aussi forts, souvent attelés aux charrettes.
Chevaux
Ceux ci sont petits et forts, traînent charettes et sont montés en selle par soldats et particuliers. Ils trainent charettes.
Mules
Celles-ci sont fort nombreuses et souvent très grandes et fortes. Elles traînent les charrettes et voitures de poids. Chose curieuse : nées de deux individus petits, elles sont fort grandes, souvent comme nos chevaux. Je ne sais le prix d’un ânes, un cheval varie de 10 à 40 taël, mais les mules sont fort chères.
Elles vont souvent de 600/700 taël à 800/1000 et celles qu’on réserve pour la selle, montent plus haut encore. Elles travaillent 10 à 15 ans et on peut encore les revendre à moitié prix, soit 50 ou 100 Taëls.
Chiens
Il y en a plusieurs espèces. La plus commune est le chien de garde. Les ... (?) existent à peine en Chine, par contre, les brigands.
Chaque maison est gardée par son ou ses chiens ; les maisons riches ont en plus un veilleur qui, toutes les heures se promène et frappe sur un bambou creux pour avertir les voleurs que l’on veille.
Mais on a toujours au moins un chien et les riches en ont des bandes aussi rien de plus commun dans les rues de Pékin, on les voit devant chaque maison par bandes de 10 ou 12 hurler aux passants, se battre ou dormir au soleil. Ils haïssent particulièrement les européens et leur courent dessus en hurlant. Le seul moyen est de se retourner, de les menacer du poing ou des pieds ou de leur lancer une pierre. Alors ils décampent comme de vrais ... (?).
Leur poil est fort rude, dur et raide. Nous en avons un qui entre ... (?) quasi noir ... (?) d’une espèce de laisse. Ils ont la vie plus dure que plusieurs chats. J’ai vu casser cannes et bâtons sur leur dos sans les tuer.
Nota : L’entrée d’un chien dans une maison est de bonne augure : signe de richesse.
Chats
Pour ceux ci l'augure est celui de pauvreté c'est pour cela qu’ils sont rares comparativement aux chiens. Aussi les rats s’en donnent et on les entend courir par bandes sur nos plafonds en papier, passer effrontément sous nos yeux dans la salle à manger.
Serpents
Nombreux, peu dangereux. Dimanche dernier, j’en ai vu beaucoup nager dans les rizières. J’en ai remarqué un mort, qui était rouge et noir, fort joli.
Lézards
Deux ou 3 espèces fort communes.
Grenouilles
Quant aux grenouilles, elles foisonnent dans la rizière et font toute la nuit et la journée un bruit infernal par las croassements perpétuels et aigus








